« Sheila Hicks vient de fêter ses 89 ans. Elle est en pleine forme et très occupée dans son atelier à Paris, sa ville d’adoption depuis 1964. Elle a désormais passé plus de temps en France qu’aux États-Unis, dont elle est originaire [l’artiste est née en 1934 à Hastings, dans le Nebraska]. »
« Sheila Hicks est diplômée de Yale, où elle a étudié la peinture avec Josef Albers dans les années 1950. C’est grâce à lui qu’elle obtient une bourse pour voyager au Chili. Débute alors un long voyage à travers l’Amérique latine. Les travaux textiles ont toujours fait partie de la pratique de Sheila Hicks, mais c’est en découvrant les tissages précolombiens et les différentes techniques de tissage locales qu’elle fait des fibres son matériau de prédilection. »

« Après ses études, Sheila Hicks décide de retourner en Amérique du Sud et s’installe quelques années au Mexique. Quand la question de la suite se pose, c’est sur Paris que son choix s’arrête : l’ébullition artistique de la capitale y est pour quelque chose. En France, le médium de la tapisserie jouit d’une longue tradition historique perpétuée par la manufacture des Gobelins – une tradition que l’esprit visionnaire de l’artiste dépassera rapidement. Elle prend un premier atelier quai des Grands-Augustins, juste à côté de celui qu’occupait Picasso. Puis elle s’installe cour de Rohan, dans un lieu unique où des artistes comme André Derain ou Balthus ont eu un jour leur atelier. Cet espace, elle l’occupe toujours. »
« Il y a quelques années, nous avons réalisé avec Sheila Hicks un projet pour Art Basel à Bâle [Sheila Hicks, The Treaty of Chromatic Zones, Art Basel Unlimited 2015]. Lorsque nous avons eu l’opportunité de présenter un projet pour Paris+ par Art Basel, les planètes se sont alignées. Nous avons commencé par regarder avec elle l’ensemble des options proposées. Le parvis de l’Institut de France, l’emplacement qui a finalement été retenu, s’est imposé comme une évidence. Il se trouve à quelques pas de son atelier, en descendant la rue de Seine, où elle a vécu quand elle est arrivée à Paris. »

« Le titre retenu pour l’installation est VERS DES HORIZONS INCONNUS (2023). Il transmet bien cette idée d’élévation et de verticalité. L’œuvre, conçue pour être montrée en extérieur, est réalisée avec des fibres synthétiques de haute technologie. Elle s’inscrit dans une série de colonnes colorées qui ont été montrées à travers le monde, de Sydney à Tokyo en passant par Houston, entre autres et, plus récemment, au Hepworth Wakefield au Royaume-Uni lors de l’exposition monographique de Sheila Hicks en 2022, et cet été au château de Menthon-Saint-Bernard, au bord du lac d’Annecy. »

« J’entretiens avec Sheila Hicks un lien privilégié, nous travaillons ensemble depuis longtemps et nous sommes tous les deux à Paris. En ce moment, nous préparons avec l’artiste une double exposition en Allemagne, à la Kunsthalle de Düsseldorf et au Josef Albers Museum à Bottrop. Cette dernière aura lieu en septembre 2024. »
Sheila Hicks présentera VERS DES HORIZONS INCONNUS (2023) sur le Parvis de l’Institut de France. Le projet est présenté par la galerie frank elbaz (Paris), avec Meyer Riegger (Berlin, Karlsruhe) et Massimo Minini (Brescia), dans le cadre du programme public de Paris+ par Art Basel 2023. Le projet sera visible du 8 au 25 octobre 2023.
Ingrid Luquet-Gad est une critique d’art et doctorante basée à Paris. Elle est en charge de la rubrique art des Inrockuptibles, membre du comité de rédaction de Spike Art Magazine et correspondante pour Flash Art.
Publié le 5 octobre 2023.
Légende de l'image de pleine page. Parvis de l’Institut de France. Photographie d'Aliki Christoforou pour Art Basel.
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