En 2024, Art Basel Paris se tenait pour la première fois au Grand Palais, permettant à la foire d’allonger sa liste de galeries et de continuer à témoigner de la richesse de la scène artistique contemporaine issue des quatre coins du monde. Pour sa nouvelle édition, la manifestation accueillera dans ce même décor pas moins de 206 exposants issus de 41 pays et territoires, parmi lesquels 29 participeront pour la première fois à l’évènement. Certain·e·s sont des galeries révélées ces dernières années, comme Lodovico Corsini, d’autres des noms plus établis, voire historiques, comme David Nolan Gallery. Focus sur neuf d’entre elles, situées dans le secteur principal.
Si le marché de l’art contemporain s’est particulièrement développé en Afrique du Sud ces dernières années, c’est en partie grâce à l’influente galerie Stevenson, présente depuis 2003 au Cap, puis à Johannesburg et à Amsterdam. Participant régulièrement aux plus grandes foires internationales, la galerie débarque au Grand Palais avec un stand de six artistes dont le travail fut fortement impacté par les transformations culturelles du pays dans les années 1990 et qui, depuis, ont été consacré·e·s par le monde de l’art. Parmi eux·elles, Penny Siopis présentera des peintures incandescentes et habitées, et Jo Ractliffe exposera plusieurs photographies poétiques en noir et blanc.
Fondée par l’un des anciens
codirecteurs de la galerie Clearing (qui a fermé ses portes en août dernier),
la galerie Lodovico Corsini a ouvert l’an passé à Bruxelles, conservant dans
son écurie plusieurs artistes phares. On retrouvera ainsi l’Américain Calvin Marcus, avec sa récente série des « Skin Paintings » : des toiles à première vue abstraites reproduisant, en
gros plan, des fragments de la peau du peintre. Peter Wächtler présentera quant
à lui deux larges paysages volcaniques, qui dialogueront avec trois intrigantes
sculptures cinétiques et hybrides de Meriem Bennani, simultanément à l’affiche
d’une grande exposition personnelle chez Lafayette Anticipations.
Les Parisien·ne·s la connaissent pour son espace pittoresque sur les hauteurs de Belleville, mais aussi, plus récemment, pour ses deux adresses Rive Gauche, où l’on peut apprécier sa programmation aussi aiguisée que joyeuse. La galerie Crèvecœur fait pour la première fois son entrée à Art Basel Paris et choisit d’y dresser des ponts entre les cultures européenne et japonaise. En attestent des paysages sur toile de l’artiste Morikazu Kumagai datant des années 1950, dialoguant avec des peintures oniriques de Yu Nishimura et d’Inès di Folco Jemni, ou encore des « objets en devenir » en cuivre de Miho Dohi. L’ensemble évoque une douce et heureuse nostalgie directement inspirée du concept japonais de « mono no aware », qui décrit la sensibilité face à la nature transitoire de la vie.
À Cologne, Jan Kaps fait partie des galeries qui font bouger l’art contemporain depuis une dizaine d’années, proposant une programmation pointue et internationale avec plusieurs artistes bien connu·e·s en France, de Jean-Marie Appriou au duo Daniel Dewar & Grégory Gicquel. À Paris, la galerie montrera deux jeunes trentenaires. Les statuettes sculptées de la Sud-Africaine Helena Uambembe, issues de son installation « Ars viva. Where will we land? » (2025) évoquent l’impact psychologique du déplacement sur les populations, s’inspirant de l’expérience de nombreu∙x∙ses Angolais∙e∙s – dont l’artiste – ayant fui la guerre civile vers l’Afrique du Sud. À leurs côtés, des toiles intimistes de Selome Muleta représentent des corps féminins au repos, hors de toute performance ou rôle, regagnant leur pouvoir.
Depuis 1997, The Approach s’est imposée comme l’une des galeries phares de l’Est londonien, ayant présenté dans le très branché quartier de Bethnal Green des artistes aussi renommé·e·s que Jeremy Deller et Tacita Dean. Présente à Art Basel à Bâle depuis trois ans, la galerie entre au Grand Palais avec une sélection d’artistes riche et variée. Collages de John Stezaker, céramique sur mur de Paloma Proudfoot, sculpture totémique en bois d’Anderson Borba… Dans ce corpus multimédia, le corps tantôt s’invite sous forme spectrale, tantôt se déforme, voire se dissèque.
Née à Chinatown et désormais installée à Soho, la New-Yorkaise 47 Canal compte parmi ses grands noms Anicka Yi et Josh Kline. Au Grand Palais, la galerie présentera notamment des œuvres inédites de Michele Abeles, qui utilise la teinture pour représenter des animaux de ferme dans des décors ruraux intimes et une peinture en plusieurs panneaux de Mickael Marman, connu pour ses abstractions énergiques et colorées. Ces œuvres s’inviteront aux côtés de celles de plus jeunes pousses, telles Emmanuel Louisnord Desir et Cici Wu, dans un accrochage généreux où les peintures s’alignent sur les cimaises et les murs, à l’image des grands salons du 18e siècle à Paris.
Là où beaucoup de galeries d’art ont pignon sur rue, Soft Opening a débuté, en 2018, en donnant… sur les couloirs de la station de métro Piccadilly Circus, à Londres. Depuis relocalisée dans le quartier de Hackney, elle s’est imposée comme l’une des vitrines majeures sur la nouvelle scène artistique de la capitale britannique. Outre-Atlantique, Chapter NY fait depuis 12 ans vibrer le Lower Manhattan en exposant les travaux de la vingtaine d’artistes qu’elle représente, de Jesse Darling à Mary Stephenson, mais aussi de nombreux invité·e·s.
Au Grand Palais, les deux galeries allient leurs forces en partageant un stand où l’on découvrira les œuvres de trois plasticien·ne·s. Représentée par les deux galeries, Gina Fischli y réunit quatre amusants chiens et chats en plâtre, tandis que Stuart Middleton (chez Chapter NY) montre de fascinants dessins au graphite reproduisant les intérieurs de machines à découper la viande et qu’Olivia Erlanger (chez Soft Opening) propose une installation de flèches d’acier qui perforent les cimaises.
Avec près de 40 ans d’existence, David Nolan Gallery est la doyenne des nouveaux·elles arrivant·e·s au Grand Palais. Sise d’abord à Soho, puis dans l’Upper East Side, elle a contribué à diffuser dans la Grosse Pomme le travail de nombreux artistes européen·ne·s (et en particulier allemand·e·s), de Georg Baselitz à Gerhard Richter en passant par Rosemarie Trockel, et continue aujourd’hui à défendre des figures internationales – une riche histoire qu’elle compte présenter aux visiteur·euse·s de la foire en accrochant sur son stand une grande variété d’œuvres sur papier d’envergure muséale signées Chakaia Booker, William Copley, Willem de Kooning, ou encore Ellsworth Kelly.
Art Basel Paris se tiendra du 24 au 26 octobre 2025 au Grand Palais. Découvrez ici les galeries participantes du secteur Galeries, et obtenez vos billets ici.
Journaliste et critique d’art, Matthieu Jacquet écrit pour Numéro, Numéro Art et Geste/s.
Légende de l’image principale : Kyoko Idetsu, 話が通じない街2/ Where words fail #2, 2024. Avec l'aimable autorisation de l'artiste et de Crèvecœur, Paris.
Publié le 8 octobre 2025.